Le Dit du Genji de Murasaki Shikibu

Roman le Dit du Genji de Murasaki Shikibu, musée du Dit du Genji à Uji.

Le Dit du Genji, une oeuvre majeure de la littérature japonaise

D’une certaine façon, l’on pourrait dire que Le Dit du Genji de Murasaki est au Japon ce que l’œuvre de Chrétien de Troyes est à la France ; tous les deux ont vu le jour au XIIe siècle et font partie des premiers romans à avoir marqué l’histoire en faisant preuve de modernité pour leur époque.
Considéré comme inspiré d’une histoire vraie, Le Dit du Genji est une œuvre majeure dans la littérature japonaise. Écrit vers l’an mil par Murasaki-shikibu, dame de compagnie à la cour de l’Empereur de Heian, l’actuelle Kyôto, ce roman a marqué des générations de lecteurs, bien au-delà des frontières du pays du soleil levant. C’est un récit composé de 54 livres qui se découpent en 3 grandes parties (dont la dernière se déroule à Uji) qui se déroule sur 70 ans. Il est l’un des premiers romans qui ait été écrit au japon et prend place durant l’ère Heian (794 à 1185 ).  L’ère Heian est considérée comme l’âge d’or des arts et de la culture dans les milieux de la haute bourgeoisie et de l’aristocratie. La cour impériale est alors à son apogée, et l’on pourrait voir Le Dit du Genji comme une carte postale qui viendrait dépeindre cette période avec beaucoup de vraisemblance. Depuis les relations entre les hommes et les femmes où tout n’est qu’amour éphémère, luxure, déception, transgression ou fantasies inassouvies, aux descriptions des jardins, des parfums ou même de la lune ; le roman de Murasaki est incroyablement moderne pour son époque, quand la plupart des écrits portaient plutôt sur les mythes et légendes.
Le Dit Genji est considéré comme l’un des premiers romans psychologiques du monde.

Le Prince Genji est un bel homme, raffiné, qui aime se parfumer, loin de l’image de l’homme guerrier du japon féodal. Alors qu’il mène son petit train de vie à la cour impériale, il recherche l’amour, le vrai, l’inconditionnel. Celui qui fera vibrer chaque once de sa peau, la passion, le feu. Il écrit des poèmes, il est poli, mais il est frivole et a un comportement auto-destructeur. Playboy, violeur, capricieux, c’est un homme méprisable et peu recommandable, mais sa beauté presque irréelle fait que tout le monde l’admire et lui passera presque tout.

La vie à la cour impériale est loin d’être un long fleuve tranquille, chacun y va de ses manigances et de ses manipulations pour parvenir à ses fins. Les hommes et les femmes se rencontrent séparés par des cloisons exacerbant les sens et les fantasmes, les amants communiquent principalement à travers des waka (poèmes de 31 syllabes).

Dans un Japon où tout est très codifié, et où les non-dits règnent en maître, Murasaki enfonce les portes et n’a pas peur de briser le silence et les tabous qui l’entourent avec subtilité et sous-entendus maniés intelligemment.

Extrait :
« Il avait, ce disant, l’air si sombre qu’il en donnait le frisson :
« S’il m’est interdit
désormais et pour toujours
de vous rencontrer
combien de vies faudra-t-il
que je passe en gémissant
Votre salut de même, pour sûr en sera entravé ! »

À cette déclaration, elle ne put retenir un soupir :

« Que votre rancœur
allât en des vies futures
jusqu’à me poursuivre
serait sachez-le la preuve
de votre frivolité. »

Elle avait dit ces mots avec un apparent détachement qui lui fit sentir qu’il était inutile d’insister, mais ce qu’elle devait penser lui rendait tout aussi pénible cet entretien, aussi s’en fut-il, à peine conscient. »
Livre X, L’arbre sacré

 Rouleaux illustrés du Dit du Genji ou emaki en japonais, scène du chapitre Takekawa (« La rivière aux bambous ») montrant la vie aristocratique. Source

Pour lire le roman de Murasaki, il faut impérativement se déshabituer de vos lectures contemporaines : non vous ne lirez pas ces 1500 pages en 3 jours. Le Dit du Genji est un roman lent et contemplatif, il se savoure petit à petit. L’écriture en prose du roman et les nombreux personnages qui l’habite peuvent parfois rendre la lecture ardue et exigeante, ce qui demande  beaucoup de persévérance. Une fois le décalage des époques dans le style d’écriture dépassé, ce sont les portes d’ un monde fascinant et intriguant qui s’ouvriront à vous. Un monde, pas si éloigné du notre finalement, entre les séducteurs qui multiplient les conquêtes, celles et ceux qui cherchent à tout prix à se rapprocher de la cour pour assurer leur ascension dans la société, les jalousies enflammées, les femmes bafouées, les manigances, la recherche du grand amour, de sa place dans une société pour laquelle nous ne sommes pas adaptés et bien d’autres. Si on y regarde de plus près, Murasaki aborde beaucoup de sujets modernes et toujours d’actualité au XXIe siècle.

Le Dit du Genji est une source intarissable d’inspiration et fait, je pense, parti des œuvres à lire une fois dans sa vie.

Rouleaux illustrés du Dit du Genji ou emaki en japonais, scène du chapitre Azumaya (« Le pavillon »). Source

Extrait :
« Admirant les fleurs
j’ai laissé passer le printemps
mais de ce jour d’hui
je m’en vais aller errant
par la forêt des soupirs »
Livre XLIV – La rivière aux bambous

Pour palier à la difficulté de la lecture du Dit du Genji je vous recommande de vous procurer en même temps que votre lecture «  À la découverte Du Dit du Genji, guide de lecture » de  Diane de Selliers. Et pour celles et ceux qui voudraient découvrir l’univers du Murasaki sans nécessairement devoir passer par les 1500 pages que représente cette œuvre, je vous recommande chaudement la biographie romancée de Murasaki «  Le Dit de Murasaki  » ( 558 pages)  de Liza Dalby . Il existe aussi, pour les mordus d’animation japonaise, un long métrage « Le Roman de Genji » de Gisaburō Sugii, sorti en 1987  très largement inspiré de l’œuvre du Dit du Genji. C’est un animé qui comme le roman, est assez lent et contemplatif et ne dure pas moins de deux heures. Les dessins peuvent parfois rappeler certaines estampes japonaises, il y a derrière cet anime un incroyable travail esthétique et graphique. En toute franchise, je ne suis pas parevenue à aller jusqu’au bout, mais il était intéressant à découvrir.  

Alors, ça vous a donné envie d’en découvrir plus sur l’œuvre de Murasaki ?

Résumé :
«  Le Dit du Genji, relate la vie du prince Genji le « Radieux », dans l’ambiance de la cour impériale de Heian, l’actuelle Kyôto. Au fil de ces amours, le Genji explore l’univers féminin afin et en apprécie les qualités tant morales qu’esthétiques. Le Genji façonnera ainsi la « femme idéale » en élevant une jeune fille avec laquelle il formera un couple que seule la mort séparera. Composé au début du XIe siècle dans l’atmosphère raffinée de la cour impériale, Le Dit du Genji avait été très prisé au sein de la noblesse, puis par un public élargi. Au cours des siècles suivants, le roman inspira poètes, peintres, écrivains et dramaturges et est aujourd’hui considéré comme le premier roman psychologique au monde. »

Pour terminer ce voyage littéraire, je vous partage quelques photos prises à Uji et Kyoto lors de mon séjour au Japon au 2018 ! C’est un pays dont la culture et la beauté des paysages me fascineront toujours.

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